LE CONTRAIRE DE L'AMOUR
NOUVELLES REPLIQUES A AVIGNON
REGARDS SUR L’ACTUALITE DU FESTIVAL OFF
LE CONTRAIRE DE L’AMOUR
D’après le journal de Mouloud Feraoun
Cie Passeurs de mémoires
Avec Samuel Churin, Marc Lauras – Mise en scène Dominique Lurcel
L’exercice d’application à la scène d’un texte littéraire est périlleux, et très développé ces dernières années. C’est cet aspect que je veux évoquer. En effet, le violoncelle à jardin et l’acteur autour, c’est un duo qui est souvent sollicité pour ce type d’adaptation et ce jour là, ça n’a pas suffit, ou alors c’était trop déjà. Le texte tout nu ou le théâtre ; texte vêtu.
On sent une véritable envie, allégeance presque à cet auteur, à son œuvre, cela est indéniable et parcourt le public. Néanmoins, le passage à la scène est un phénomène incident, qui doit se penser me semble – t – il indépendamment de l’œuvre textuelle jouée. Ici, j’ai reçu un flot de paroles issues du journal de Feraoun. Un flot anarchique, pas très au fait du rythme et du rapport à la scène et au public. Les interventions musicales sont attendues, dissonantes pour exprimer la crainte et le chaos, et langoureuses pour traduire la mélancolie et le tragique. C’est un peu systématique avec l’usage du Violoncelle, et c’est bien regrettable d’étiqueter et de réduire aux mêmes emplois, cet instrument qui a bien plus à révéler. Ici encore, il faut choisir son propos : le violoncelliste intervient en jouant au début du spectacle, puis devient lecteur par la suite, devant son pupitre. L’acteur marche sur des lattes de bois sans toucher le sol, et s’y déplace de temps à autre, sans vraiment de sens théâtral, et les lumières n’ont aucune place dans la création, le décor n’évoque rien de précis, et n’est pas traité en tant que tel. La dramaturgie fait aussi cruellement défaut à ce spectacle.
Cette proposition ne se prononce pas artistiquement, et se situe à mi chemin entre le Théâtre et la valorisation littéraire assortie de violoncelle.
Les deux interprètes sont pourtant talentueux, mais ils ne sont pas liés à une œuvre scénique, si ce n’est par l’engouement et l’engagement que l’on sent, pour ce journal important et poétique de Feraoun, qui est mise en place par le metteur en scène avec une réelle conviction, c’est certain.
Néanmoins, le Théâtre réclame plus que l’agencement textuel, et l’évocation ne suffit pas à transporter un public, sinon point n’est besoin de Théâtralité, une lecture théâtralisée aurait fait l’affaire.
Iris Gamme