Hamlet d'après Hamlet de Shakespeare

Publié le par nouvellesrepliques

Par la troupe du Théâtre Permanent (Aubervilliers 2009)

Avec : Renaud Bechet, Virginie Colemyn, Julian Eggerickx, Barbara Jung, Grégoire Monsaingeon, Gwenaël Morin et Ulysse Pujo - Mise en scène : Gwenaël Morin

Traduction : Loris Lacoste

 

 

 

Lorsque nous entrons dans la salle, nous nous retrouvons...sur scène. Un présentateur télé aux allures de dandy anglais nous accueille et nous invite à nous asseoir. Des gradins, nous pouvons enfin jauger la totalité de l'espace scénique : une scène nue, un rideau noir, des banderoles collées au mur présentant le spectacle et ses interprètes...où sommes-nous et que va-t-il se passer ?  

Le spectacle commence : il va durer trois heures, mais cela passe si vite !  Tentons d’être synthétique sans pour autant oublier l’essentiel.  

Hamlet d'après Gwenaël Morin, c'est un classique sans décors, avec quelques accessoires et éléments de costumes (des croix de bois en guise d'épées, une couronne royale en carton, une robe blanche enfilée par dessus le pantalon...) Ce qui laisse plus de place à l'imaginaire de chacun ; on est libre de voir ce que l'on veut voir. Par exemple le spectre du défunt roi de Danemark et père d'Hamlet est représenté par une simple ouverture de rideau. Le jeu seul des comédiens nous signale sa présence. A nous de lui donner la forme que l'on souhaite...Il en est de même pour le combat final entre Hamlet et son rival Laërtes : aucune action physique n'est effectuée, les coups sont portés par le texte seul « envoyé » vers l'autre : les mots se heurtent et vont jusqu'à tuer.

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Hamlet d'après Gwenaël Morin, ce n'est pas tout à fait le texte de Shakespeare : Joris Lacoste a traduit et réécrit à sa manière la version originale, modifiant certains passages et y incorporant des expressions contemporaines et des clins d’œil directs au spectacle en cours d'exécution. Il est par exemple fait allusion aux K-ways que portent les acteurs, ou à la musique jouée sur scène par l'un des comédiens.

Hamlet d'après Gwenaël Morin, c'est aussi et surtout la mise en place d'un nouveau rapport au public : celui-ci trouve son double sur les planches via les comédiens qui, lorsqu'ils n'interviennent pas dans une scène regardent leurs camarades jouer. Les spectateurs sont activement sollicités par les artistes qui n'hésitent pas à les interpeller, à déambuler au milieu des gradins.... à la fin du spectacle, le public est invité à prendre place sur scène pour suivre le dénouement du drame (le duel avec Laertes). Ce rapport de proximité étonne agréablement et l'on a le sentiment de faire partie intégrante de l'histoire : sommes-nous les sujets de la cour de Danemark ?

Avec ce spectacle, la troupe du Théâtre Permanent nous montre qu’on peut faire du théâtre avec peu de choses: ce qui compte n'est pas le décorum, mais la créativité et l'énergie que chaque membre de la troupe met dans le projet. Les acteurs, par leur dynamisme et leur talent peuvent nous faire croire tout ce qu'ils veulent ! Cette joyeuse troupe témoigne d'un véritable engagement artistique et s'interroge sur ce qu'est vraiment le théâtre. Ils nous obligent à sortir de notre passivité, notre torpeur, et à entrer dans l'action. Nous ressortons avec la sensation de n'avoir pas fait que « consommer » du théâtre.

 

« Avec le Théâtre Permanent je veux déplacer l'acte symbolique de louer une place de théâtre à l'acte symbolique de se constituer spectateur » Gwenaël Morin

 

Delphine Leroy

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